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Virées du week-end

"Le coeur des enfants Léopards" du Tarmac

mercredi 9 mars 2011, par Doszen

Le cœur, le cri, la rage, le désespoir. Le sombre enchainement de circonstances d’une journée qui finit en enfer. La fatidique loi de l’emmerdement maximum du sieur Murphy qui vous élit. Quand vous perdez tout, vous vous perdez vous, en l’espace de quelques heures, en l’espace d’une vie.
Mais aussi le rythme endiablé du récit, le flow slammé, rapé, tempêté des aveux d’un pauvre bougre que sa banlieue a rattrapé. Crime ultime que le sort a sournoisement dirigé vers un symbole de l’ordre, le destin qui se rit des hommes et dirige la pluie des coups de savate du banlieusard pépère vers le crâne explosé d’un exemple fantasmé de flic propre.
C’est ça "Le cœur des enfants Léopards", c’est ça l’œuvre de Wilfried Nsondé, une résidence de quelques heures dans la tête d’un gamin déboussolé, rendu fou par la vie. Un voyage à reculons dans les années qui l’ont vu grandir, qui l’ont vu perdre espoir, ami, rêves, amour, illusions, raison.

Ensuite il y a Criss. Criss Niangouna, comédien de son état, qui – par je ne sais quelle lubie – a décidé de faire vivre le texte de Nsondé. Peut-être a-t-il reçu le même énorme coup de massue qui a transpercé ma tête à la lecture de ce roman.
Peut-être. Surement. C’est évident. Son âme de griot-caméléon n’a pas pu s’empêcher de se dire "putain de bordel de sa mère ! Ce texte mérite la lumière des projecteurs d’une scène vivante".
Et les lumières des projecteurs. Les lumières qui traversent la scène en traits, n’éclairant que faiblement une scène sur laquelle 5 chambranles de portes isolés vous mettent en garde à vue avec le personnage. La pièce est nimbée de pénombre, le sol jonché de panneaux blancs en forme de puzzle.
L’atmosphère sombre et angoissante, la confusion dans la tête du personnage, les références aux ancêtres, au bitume de la cité. Tout le roman est là.
Et la folie. La folie, la rage de ce gamin à qui ce flic de capitaine veut soutirer des aveux sont des gifles quand elles sont rendues par le jeu de Niangouna. Le comédien "mouille le maillot", dirait-on de par chez moi.
Pendant 1 heure Criss Niangouna crie, saute, rampe, se fige, hurle, geint, gémit, explose la scène de par sa présence. C’est fort. C’est très fort.
Nous sommes avec le personnage, nous sommes dans sa tête, nous sommes à ses côtés et petit à petit, comme Nsondé a su si bien le faire avec des mots disséminés sur des pages blanches, Niangouna nous dévoile les ressorts du drame, les racines de la déchéance. C’est fort, c’est plus que fort.

Du 1er au 19 mars, au théâtre "Le Tarmac de la Villette" se produit un énorme comédien qui joue le texte d’un magnifique roman.
Vini, vidi et je suis reparti conquis par la qualité de ce spectacle de la vie et par la générosité du comédien qui interprète cette pièce. J’ai applaudi à m’en décaper les mains, alors munissez vous d’engouent, de moufle ou de mains de rechange, et allez assister à ce magnifique moment de théâtre.



LE COEUR DES ENFANTS LÉOPARDS


Wilfried N’Sondé / Dieudonné Niangouna
D’après le roman de Wilfried N’Sondé (Actes Sud, collection Lettres africaines, 2007)

Adaptation Dieudonné Niangouna et Criss Niangouna
Mise en scène Dieudonné Niangouna
Scénographie Patrick Janvier
Création lumière Laurent Vergnaud
Avec Criss Niangouna

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